"Le syndrome d'Adrastée" est un thriller psychologique.
Je vous joins la photo de couverture et le 4ème de couverture.
Merci.
Lorant Fielder
Voici donc l'extrait de la semaine :
Le désir de se faire aider se trouve la plupart du temps découragé par l'espoir que tout ira mieux demain, et les coups pleuvent de nouveau. Le même classique schéma de la brutalité répété jour après jour. La même impasse quotidienne.
Scruter la moindre contrariété. Voir naître la frustration. Détecter le déclic. Observer la pression monter. Sentir le processus s'enclencher. Se résoudre à l'impuissance. Mobiliser ses sens. Déceler la rage. Ne pas pouvoir décider : préférer la rébellion et l'opposition : être battue. Choisir la soumission et l'obéissance : être frappée. Se décourager de ce choix sans issue. Se résigner. Se noyer dans le torrent de violence. Renoncer à se libérer. Laisser pleuvoir les coups. Gagner du temps. Se protéger. Esquiver, mais pas trop. Détourner la colère. Tomber. Ramper. S'escamoter dans sa carapace. Se recroqueviller. Redevenir un fœtus. Songer à autre chose. Imaginer un moment de bonheur. Prier. Encaisser. Subir. Saigner. Souffrir. Sentir la vie s'enfuir. Penser mourir. Atteindre la lumière. Et survivre cette fois encore. Se décider. Se jurer haut et fort de le dénoncer. Et finir par abandonner. S'effrayer du regard des autres. Trembler. Frémir de sa vengeance. Se persuader de se laisser une dernière chance. Se convaincre que l'on peut toujours aimer. Rêver. Et recommencer.
— Oui je vais réfléchir. Vous avez vraisemblablement raison.
— C'est bien Samira. Je ne vais pas continuer à vous expliquer les conséquences. Vous les connaissez maintenant aussi bien que moi. Vous prendrez la bonne décision, j'en suis sûre. Je ne vous laisse pas de carte de visite, de peur qu'il ne la découvre. Je repasserai vous voir dans un mois, si cela vous convient, mentit à regret Martine.
— Oui je veux bien. Merci, s'autorisa Samira déconcertée par cette rencontre.
— Surtout, ne lui parlez pas de ma visite. Jamais ! J'insiste. C'est très important, vous le paieriez très cher. Je sais que vous ferez preuve de prudence.
— Oui, oui, j'ai compris. N'ayez crainte.
Martine prit congé et céda la place à Samantha.
J'ai la confirmation de mes soupçons. Cheminal semble bien une ordure de la pire espèce. Ce genre d'individu ne changera-t-il jamais ? Si je n'agis pas, que deviendra-t-elle ? Une victime de plus ? Battue, tuée, le visage défiguré comme Sandrine avant elle ?
Triste de ce constat, Samantha revint à Montreuil. Sans attendre, et n'accordant pas la moindre attention aux miaulements de Maurice, elle se déshabilla et se glissa sous la douche. La factice Martine Jacquart en avait trop vu. Elle devait se libérer de l'obsessionnelle vision de cette femme meurtrie.
Elle se frictionna le corps et la tête avec énergie. Un entrelacs multiple, et filandreux s'immisça entre ses doigts mouillés. La malade resta figée de longues secondes, interdite. L'horrible échéance l'assomma. Inquiète, elle se massa à nouveau le crâne et vit le même amas de cheveux étalés sur ses mains. Ce constat aiguillonna son cœur.
Une étape de plus. Ce n'est pas comme si tu ne t'y attendais pas. J'avais gardé un mince espoir. On se dit : « Cela n'arrive qu'aux autres. Je ne suis pas concernée ». Ces cheveux perdus représentent aujourd'hui la réalité concrète de mon mal… L'ennemi est identifié. Je réfute le pudique terme de « longue maladie » qui supposerait le cancer doué d'une force sournoise, secrète et mystérieuse. Ce serait lui accorder bien trop d'honneur ! Cancer ! Cancer ! Cancer ! Je te vois maintenant. Je te combats.
Accompagnée par la messe de Requiem, chantée par le chœur de l'orchestre philharmonique de Vienne, Samantha se remémora sa triste journée : l'image de Samira tabassée et la preuve de son alopécie naissante. À cette évocation, sa colère rentrée, monta, inéluctable bouillonnement. Elle exécrait cette émotion irrépressible qu'elle sentait poindre du plus profond d'elle-même. Plus la pression augmentait et plus la prise de conscience de sa possible perte de contrôle la déstabilisait. Ces deux indignations mêlées redoublèrent, crescendo. Spirale infernale. Cette nouvelle manifestation de haine, constituait-elle une étape nécessaire à la recherche de sa maîtrise ? Et si, au moment de l'action, elle cédait à ce sentiment violent sans pouvoir le dominer ? La fureur, brute, basique, la submergea en une vague paroxystique. Elle l'expulsa en poussant un cri massif et libérateur. Un son rauque, animal, s'éleva de ses entrailles. Le rugissement, tel un réflexe de défense résonna dans le même temps que la note grave du « Rex ». Abattue, la cancéreuse calfeutra ses sens. Elle perçut à peine la fin du « Tremendae » laissant le « Recordare » s'exprimer dans un souffle long et apaisant. Rédempteur.
Le Syndrome d'Adrastée
Chapitre 21
Chapitre 21
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